

PREMs, PROMs, indicateurs en santé et rémunération des médecins
Voilà deux nouveaux acronymes dans le monde de la santé …. qui n’en manquent pourtant pas.
PREMs et PROMs signifient Patient-Reported Outcome Measures et Patient-Reported Experience Measures, c’est-à-dire l’avis que peut donner chaque patient quand on lui offre la possibilité de s’exprimer sur les résultats d’une démarche ou d’un traitement qu’il vient de suivre (PROM) ou bien quand il s’exprime sur son ressenti au cours de cette démarche/traitement (PREM). Ce sont donc ce qu’on appelle des indicateurs ; et depuis une quinzaine d’années, ces indicateurs jouent un rôle croissant dans l’administration du monde de la santé et plus récemment dans l’épidémiologie, la recherche clinique, le suivi des malades au quotidien et finalement l’analyse des pratiques cliniques. Le développement des systèmes d’information – longtemps chaotique mais désormais proche de sa maturité – n’y est pas pour rien.
Justement, le rapport Aubert* (du nom de son auteur principal, Directeur d’administration centrale au ministère de la santé, après avoir exercé une responsablité à la direction de la CNAM puis un passage dans le privé et aux Etats-Unis) propose une évolution majeure des modalités de rémunération des médecins. Et cette évolution repose précisément sur la prise en compte d’indicateurs pour le calcul des rémunérations.
En résumé, le rapport propose un « paiement combiné » néo-formulation d’une diversification esquissée déjà depuis plusieurs années avec divers forfaits et ROSP.
Ce paiement combiné devrait comporter les différents types de rémunération suivants, en plus du paiement à l’activité (pour les hôpitaux et cliniques) et du paiement à l’acte (pour les médecins libéraux).
1 – Le paiement au suivi
Type de paiement est particulièrement adapté aux pathologies chroniques puisqu’il favorise un suivi au long cours, orienté sur les résultats obtenus pour le patient et la prévention des complications.
2 – Le paiement à la qualité et à la pertinence
répondant à une double nécessité :
- De faire une place plus importante aux résultats pour les patients et pouvoir ainsi garantir à chacun une prise en charge de qualité ;
- Que les soins réalisés soient pertinents
3 – Le paiement pour la structuration du service
Il s’agit de permettre et d’organiser l’offre et de favoriser l’accès aux soins et la réponse aux besoins des populations sur les territoires (ce type de paiement devrait notamment permettre des équipements structurants comme l’informatique et la télésanté, par exemple au sein des regroupements pluriprofessionnels comme les maisons de santé).
4 – Le paiement à la séquence des soins
permettant de rémunérer conjointement une séquence de soins (intervention puis rééducation par exemple) à différents professionnels (rémunérés aujourd’hui indépendamment les uns des autres). Ce type de rémunération correspond au « bundled payment« , mis en œuvre avec des résultats irréguliers mais souvent probants aux États-Unis, par exemple pour les prothèses de hanche.
Chacune de ces quatre modalités de rémunération suppose la production d’indicateurs cliniques.
En réalité ces indicateurs et l’utilisation qui en est faite traduisent une évolution majeure du rationnel sur lequel les médecins voient les services qu’ils offrent rémunérés.
Tout cela a été très bien analysé, expliqué et porté par des collègues et leaders professionnels notamment nord – américains depuis plusieurs années. En conservant les termes originaux (la traduction en français est plutôt laborieuse alors que le vocable original tout à fait explicite) il s’agit de passer d’une rémunération fondée sur le HIGH-VOLUME (d’actes), à une rémunération fondée la HIGH-VALUE ; cette HIGH-VALUE étant définie par deux termes, d’une part la mise en œuvre des « bonnes pratiques » (ce qui est tout autre chose que l’application de recos) et d’autre part l’utilité ressentie par les patients ; qui pourrait s’en plaindre ?
Evidemment une telle évolution du rationnel peut susciter les craintes des médecins ….
D’autant qu’à ce jour de tels indicateurs sont souvent contestés, en particulier pour leur difficulté à traduire correctement les réalités cliniques…
Qu’en sera-t-il quand, de surcroît, les médecins devront s’accommoder d’autres indicateurs encore balbutiants comme les PROMs et PREMs permettant de recueillir l’avis et le ressenti des malades sur l’utilité des soins ?
*https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dicom_financement_ma_sante_2022_synthese_vdef.pdf